Un tour de France en avion... hybride

6 juillet 2021 à 10h53 par Alexandra BRUNOIS

l'avion de démonstration Casio de la société Voltaero
Crédit : Yann Launay

Il n'y a pas que le Tour de France cycliste qui partait de Bretagne en ce début d'été. Ce lundi, le premier Tour de France en avion hybride s'est élancé de l'aéroport de Lorient. Ce tour n'est pas une course mais une démonstration : la société Voltaero veut prouver que son prototype est une solution pertinente pour relier des villes de façon efficace et moins polluante.

L'avion de démonstration, "Cassio", mis au point à Royan (Charente-Maritime), embarque 5 moteurs électriques et un moteur thermique, comme l'explique Jean Botti, co-fondateur de Voltaero, et ancien directeur général technologie innovation du groupe Airbus

"C'est un avion électrique d'abord : tous ses décollages et tous ses atterrissages sont en électrique. Toutes les distances inférieures à 200 km sont couvertes en pur émectrique. Entre 200 et 600 km, vous avez une recharge légère, en vol : le moteur thermique vous sert à recharger les batteries, et au-delà de 600 km, vous faites plusieurs recharges en vol. Au global, pour une utilisation moyenne, vous faites entre 17 et 30 % d'économie d'énergie, et l'empreinte carbone se réduit d'autant..."

Jean Botti, co-fondateur de Voltaero
Crédit : Yann Launay

Et l'économie de carburant, la réduction, en vol, des rejets de gaz à effet de serre, n'est pas le seul avantage de cet avion hybride :

"Notre avion décolle, atterrit en électrique : il est moins bruyant. Il propose une double source de sécurité : vous avez un problème en l'air, vous avez une autre source d'énergie... Les moteurs électriques sont extrêmement fiables, et les batteries, vous n'y touchez pas : tout ce qui est électrification n'ajoute rien en complexité, et puisque la fonction du moteur thermique est d'être un chargeur de batteries, vous le faites fonctionner à son point optimal... Vous avez une durabilité du moteur qui est sans commune mesure avec un moteur qui fait des accélérations -décélérations tout le temps..."

Jean Botti, co-fondateur de Voltaero
Jean Botti, co-fondateur de Voltaero
Crédit : Yann Launay
Olivier Galzi devant le Cassio
Crédit : Yann Launay

Le prototype utilisé sur ce tour de France préfigure les modèles commerciaux que Voltaero veut proposer dés 2023 : une gamme de 3 avions hybrides, capables de transporter de 4 à 10 personnes, et du matériel. Mais sur quels types de lignes aériennes ? La réponse d'Olivier Galzi, vice-président d'EDEIS, spécialiste de l'exploitation d'aéroports et promoteur de l'avion hybride :

"Tous les trajets qui ne sont pas faits aujourd'hui par les autres moyens de transport... Le train a apporté des solutions intéressantes sur l'axe Nord-Sud, mais quand on doit se déplacer d'Est en Ouet en France, c'est compliqué... Demain, pour moi, les Régions pourraient presque se mettre d'accord ensemble pour acheter une flotille de ce type d'appareil, et se mettre d'accord pour désenclaver elles-mêmes de territoire à territoire, sans passer par Paris... Cela permettra d'aller à des endroits où les connexions avaient été délaissées, et d'une manière écologique et durable..."

Olivier Galzi, vice-président d'EDEIS
Crédit : Yann Launay

Les futures avions hybrides de Voltaero ont vocation à couvrir des distances de quelques centaines de kilomètres, des trajets de moins de 2 heures... Pourtant le gouvernement souhaite privilégier le train sur ce type de trajets... Mais pour Jean Botti, il n'y a pas de contradiction : "On offre une aviation plus verte, plus à taille humaine... On ne pourra pas tout faire en train, en TGV, il n'y a pas les infrastructures pour... Je pense qu'on est un complément parfait au TGV, et dans certains cas, un complément plus que parfait pour remplacer l'automobile : on a rentré plus de 1200 destinations en comparatif, on sait quel est le coût par kilomètre avec notre avion : la plupart du temps, c'est intéressant..."

C'est à Rochefort sur Mer que sera bouclé ce tour de France : Rochefort où la future usine de production Voltaero doit voir le jour, pour produire des avions hybrides 100% français. La concurrence est pourtant déjà rude, dans ce domaine, avec des constructeurs chinois et américains sur les rangs. Mais pour Didier Esteyne, l'un des pilotes de Cassio, et directeur technique de Voltaero, non seulement il y a de la place pour un constructeur français, mais son équipe est loin d'être à la traîne :

"On a commencé en 2009 à penser à l'électrique, et on n'a jamais arrêté : en 2015, avec l'E-fan, j'ai traversé la Manche, c'était une première, et en 2018 on a commencé le projet Cassio. Toute l'équipe Voltaero a acquis une expérience avec plusieurs prototypes, ce qui nous permet d'être assez sereins sur ce que l'on veut et ce que l'on doit faire dans l'avenir..."

Didier Esteyne, pilote de Cassio et directeur technique de Voltaero

Les 3 premiers modèles d'avions hybrides Cassio seront proposés à la vente en 2023, à des tarifs compris entre 700 000 et 2 millions d'euros en fonction du modèle.

Le Tour de France en avion hybride fera étape au Havre, ce mardi, avant Troyes, Dijon, Annecy, Aix, Nîmes et Toulouse, pour une arrivée à Rochefort sur Mer le 11 juillet.