La fin du festival Couvre-Feu ...

7 octobre 2018 à 11h04 par Dolorès CHARLES

Après des années de galère financière, et 20 ans d'activisme pour que le festival musical vive, c'est la liquidation judiciaire.

HIT WEST
Crédit : Pixabay

Il n’y aura plus de festival Couvre-feu. Une décision dont se désole Hit West partenaire depuis des années de Couvre-Feu. Malheureusement, la fréquentation n’a pas permis à l’association d’atteindre son point d’équilibre financier. Déficit de spectateurs, soutien régressif de la communauté de communes, polémiques malveillantes, etc. Les membres de l’association n’ont disent-ils plus « les moyens de donner vie à leurs utopies ». Une procédure de liquidation judiciaire a été mise en place.

De ces 20 années d’activisme ils retiendront entre autres les 400.000 spectateurs accueillis, les échanges avec les 548 artistes ou formations artistiques programmés, et l’engagement sans faille des bénévoles.

[Communiqué de L’ASSOCIATION COUVRE FEU]

"Août 1998, 4 jeunes âgés de 19 à 21 ans se réunissaient pour créer une association à Corsept, sur un territoire où tout était à faire au niveau culturel. Chacun apportait 100 Francs (15€) soit 400 Francs (60€) pour lancer le projet. 3 soirées organisées et 2 années plus tard, une bande de punks à chapiteaux arrivant de banlieue parisienne et un animateur socioculturel fraîchement installé en Brière rejoignaient l’aventure pour lancer la première édition du Festival Couvre Feu !

« Il faut s’occuper des autres. Au lieu de construire un commissariat et un terrain de basket, construisons un centre culturel, pour que les gens soient moins cons. Parce que moi, l’art m’a sauvé la vie et c’est ce que j’aimerais communiquer aux autres. Leur dire qu’il y a toujours quelque chose de beau à sortir de n’importe quelle merde. » Mano Solo (Président d’honneur de l’association)

1998-2018, 20 ans que les membres de l’asso se battent pour rendre la culture accessible à toutes et à tous. Convaincus de la nécessaire existence d’une alternative artisanale et indépendante face aux propositions commerciales de l’industrie du spectacle, nous avons construit ce projet ensemble, en prenant le temps de le faire évoluer, pour que notre action ait toujours du sens et partage les valeurs qui nous sont communes.

Cette 16ème édition du Festival Couvre Feu fut exceptionnelle à bien des égards. D’abord, l'ambition artistique et culturelle, avec 35 groupes, une troupe de théâtre, une conteuse, un jeuspectacle, une installation artistique monumentale de Christian Champin, des jeux grandeur nature... Ensuite l’investissement et le soutien indéfectible de celles et ceux sans qui tout cela n’aurait pu exister (bénévoles, techniciens, salariés, artistes, partenaires, prestataires, fournisseurs…). Et, bien évidemment, le public ouvert et respectueux, ses sourires et ses compliments adressés à l'ensemble des équipes pour le travail réalisé. Les commentaires quasi unanimes sur les réseaux sociaux, soulignant la qualité de l’événement nous ont beaucoup touché.

Malheureusement, cette année, la fréquentation ne nous a pas permis d’atteindre le point d’équilibre financier. Un déficit de spectateurs (que nous avions déjà connu en 2015 à Corsept et en 2016 quand nous nous sommes retrouvés nomades) qui, combiné au désistement progressif du soutien de la communauté de communes, nous met, aujourd’hui, dans une situation financière désespérée. N’ayant plus les moyens de donner vie à nos utopies, c’est avec une profonde tristesse que nous avons dû nous résoudre à mettre fin à notre association et qu’une procédure de liquidation judiciaire a été mise en place.
Bien que nous soyons conscients que les embouteillages de 2017, la présence démesurée des forces de l’ordre aux abords du festival, l’incompréhension du projet itinérant en 2016, les polémiques malveillantes et mal informées suite au départ de Corsept, ont eu un réel impact sur le Festival Couvre Feu, l’heure n’est plus à l’analyse des raisons de la situation. Quand on est organisateurs de festival culturel, on ne peut supporter d’être injuriés ou menacés parce que l’État décide de mobiliser 200 gendarmes pour contrôler des personnes venant faire la fête ou parce qu’on déplace un événement de 15 km…

De ces 20 années d’activisme, nous retiendrons :
- Les 400 000 spectateurs accueillis sur nos différents événements organisés dans 16 communes différentes.
- Les rencontres et les échanges avec les 548 artistes ou formations artistiques programmés.
- L’engagement sans faille des bénévoles (d’hier et d’aujourd’hui) et de l’équipe technique, venus chaque années des 6 coins de France, d’Europe ou d’ailleurs, et ce uniquement pour défendre la culture associative et indépendante.
- L’accueil chaleureux et ouvert de la commune de Paimboeuf quand nous avons dû trouver de nouveaux bureaux.
- Les soirées dans le petit manoir du Pasquiaud de Corsept jusqu’au Zénith de Nantes !
- Le concert de Manu Chao dans le Parc du Pointeau de St Brevin en 2008.
- L’expérience humaine et logistique incroyable de La Caravane de Couvre Feu en 2016.
- La fidélité, le soutien et l’engagement de nos amis Les Ogres de Barback.
- La mise en place et la gestion d’un projet portant des valeurs d’ouverture et d’accueil au Quai Vert.
- Le soutien du public, des bénévoles, des techniciens, des prestataires, du Conseil Départemental de Loire Atlantique et du Conseil Régional des Pays de la Loire lors de notre appel aux dons en 2016.
- L’inspiration et les conseils du regretté Mano Solo.
- Cette 16ème édition du Festival Couvre Feu qui, malgré la trop faible fréquentation, restera la plus belle et la plus aboutie.
- 20 années d’une structure vivante et indépendante, autofinancée à plus de 90%.

La structure est morte, mais les projets que nous avons créés, portés et réalisés resteront. Le passé ne s’efface pas. La créativité et la solidarité de notre collectif ne s’achètent pas.
Merci à vous, public de Couvre Feu, sans qui ces 20 dernières années n’auraient tout simplement jamais existé. Vous qui avez toujours été notre priorité, et pour qui nous n’avons eu de cesse de nous renouveler pour vous surprendre. Merci aux curieuses et aux curieux qui sont venus découvrir nos folies sur tout le territoire pendant toutes ces saisons. Merci pour tous les souvenirs que vous nous laissez.

« La Culture n’est pas un luxe, c’est une nécessité. »
Plus que jamais, nous croyons à cette phrase de Gao Xingjian. Et, malgré cette fin que nous aurions souhaité plus heureuse, nous restons soudés et fiers du chemin parcouru. Les projets ne manquent pas dans les tiroirs…

Rassemblez-vous, imaginez, créez ensemble, croyez-y fort !

Sortez dans les soirées et les festivals associatifs, vous seuls les faites (sur)vivre !

« Tout seul on va plus vite, ensemble on va plus loin ! »

À bientôt.

Les membres de l’association Couvre Feu"